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ZAD, Ils végètent, on s’enracine !

Publié: 30 novembre 2014 par Page de suie dans Articles
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Nouvelles fraîches de la ZAD

Chantier collectif de plantation et semis d’arbres en pépinière.

Rendez-vous le dimanche 14 décembre de 10 à 18 heures au carrefour du moulin de Rohanne

Pendant que les décideurs s’embrouillent dans un méli-mélo juridique, que la préfecture cherche encore un moyen de nous dégager, que les médias tentent de nous diaboliser… nous on continue d’occuper ! 🙂

Avec ou sans projet d’aéroport, nous habitons ici et sommes déterminé-e-s à y rester. C’est pourquoi nous avons défriché un terrain pour y planter une cinquantaine d’arbres fruitiers.

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Comme lors de l’ouverture de la ferme maraîchère du Sabot en 2010 ou d’autres dynamiques  « Sème ta Zad », nous invitons petit-e-s et grand-e-s à participer avec nous à l’occupation de cette parcelle en :

  • Plantant et paillant les arbres
  • Semant des graines et noyaux
  • Installant une clôture autour de la pépinière, etc…
    .

Parce que les savoirs et savoir-faire sont trop peu partagés nous avons imaginé cette journée comme un moment convivial et propice à l’échange. Nous mêmes ne sommes pas des spécialistes et désirons retransmettre autant qu’apprendre.

Comment venir ?

Le carrefour du moulin de rohanne est un carrefour à 4 « branches » qui se situe sur la D81 entre Vigneux de bretagne et le carrefour des Ardillères (carrefour qui sépare les directions Fay de bretagne et Notre dame des landes, voici un lien vers la carte détaillé de la ZAD). C’est aussi l’emplacement de la cabane du « non-marché » et le lieu de ramassage des poubelles pour la ZAD (repères visuels). Des panneaux y indiqueront la direction pour aller à pied au champ où auront lieu les plantations, à deux pas du carrefour.

Nous avons un plan de verger précis, nous n’aurons pas forcément de place pour planter des arbres que vous voudriez offrir. Par contre si vous avez gardé des pépins ou noyaux de fruitiers ou d’arbres des haies locales et que vous souhaitez les planter ici avec nous, c’est bienvenue !

Pour celles et ceux qui veulent :

  • Il y a encore du boulot de défrichage (ronces et prunelliers), amenez des outils adaptés si vous êtes motivé-e-s !
  • Vous pouvez vous débarrasser de vos cendres de bois en nous les amenant, ce sera un très bon engrais pour les arbres !

Venez avec des bottes et si vous voulez, un truc à grignoter à partager.
On se charge du repas de midi !

Pour toutes questions/remarques :
racinespourlouest@riseup.net

dimanche 14 décembre de 10 à 18 heures au carrefour du moulin de Rohanne

Le lien vers « Sème ta ZAD » d’avril 2013

  « En clair, le 22, je faisais de la politique. A voté. Point..! »

 

NDDL 22 février

 

Je me contenterai donc de reproduire ce texte anonyme brut de décoffrage… vous êtes assez grands pour en tirer vos conclusions personnelles, non?

En rentrant de Nantes, je pensais ne rien écrire. Je me disais que ce n’était pas nécessaire. Que l’essentiel avait été de vivre cette journée-là. Et que le torrent médiatique sortirait de toute façon de son lit pour venir noyer cette manif. Je savais qu’il recouvrirait entièrement nos gestes et nos histoires. Et qu’il ne laisserait derrière lui que boue, effroi et désolation. Comme d’habitude. Face à cette capacité de confiscation de la réalité qu’on appelle information, nos mots, mes mots, je les imaginais dérisoires. Pourquoi s’embêter, alors ?

Sauf que cette fameuse journée, elle s’est mise à faire les cent pas dans ma cage à pensées. Elle ne voulait pas en partir. Je ne savais ni pourquoi, ni comment, mais cette manifestation m’avait bougé. J’y pensais et je trépignais devant l’ordinateur. Je ressassais.

J’enrageais, aussi. Je bouillais littéralement en lisant les comptes-rendus de procès des quelques personnes chopées à la fin de la journée. Ou en me plongeant dans le récit du manifestant qui a perdu un œil. Un de plus1.

Je lisais aussi ce qui pouvait bien se dire dans le salon et la cuisine de monsieur et madame tout le monde : la France avait peur. Grave. À en mouiller le tricot de peau. Le ton employé par les médias au sujet de la dite « émeute » du 22 me rappelait un souvenir d’enfance : la voix de ce commercial qui tentait de vendre une alarme à mes parents après qu’ils se soient fait cambrioler. Les mêmes mots. Le même ton. C’est toujours pareil. Quand créer du danger de toute pièce te permet de payer tes vacances ou d’acheter une motocyclette à ton ado de fils, tu sais te montrer convaincant. Tu racontes la peur, ta peur, tu ne lésines pas, t’y vas franco et, au passage, tu déroules le tapis rouge à l’ordre en vigueur, parce que l’ordre tu en profites goulûment.

Bref, j’en étais là : elle me prenait la tête, cette journée du 22. Elle était là, un peu partout. Dans leurs bouches, derrière leurs mots, au centre de leurs images. Et forcément, j’y étais aussi. J’écris « forcément » parce que j’ai fait partie de ce qu’eux nomment « casseurs ». Moi et quelques copains. On agissait ensemble, petit groupe solidaire. Rien de fou, hein, nul fait d’arme. Simplement, on était là. On a fait quelques trucs, on s’est agités. Point.

Je suis donc « un casseur ». Mais « un casseur » hyper-sympa. La précision est importante. Parce que dans les deux semaines qui suivent ce genre de journée, tu as quand même largement l’impression que beaucoup de gens viennent mettre leur main dans le derrière de la manif afin de lui faire dire tout et n’importe quoi. Beaucoup de ventriloques et de tours de passe-passe, dans les articles, sous les articles, dans les images, sous les images. Une hypertrophie des enjeux, servie sur son flux continu d’informations, à la sauce virtuelle. Avec un soupçon de connerie.

Reprenons. Je suis « un casseur » sympa. Et je ne suis pas complètement con non plus. Alors quand je lis un peu partout que ce jour-là j’ai été manipulé et que je n’ai rien compris à ce qui s’est passé, j’ai envie de dire : comme d’habitude. Ni plus, ni moins – certainement moins, en fait. Oui, je suis manipulé. Comme au supermarché, au boulot, devant des guichets, des médecins, des profs, des représentants de la loi en tous genres. Comme tout le monde. Oui, je suis manipulé, pour peu d’entendre par là : « Soumis à des forces qui me dépassent ». Mais je me soigne. Je l’ai accepté, ce statut de petite souris dans une cage. Je l’ai accepté parce que je me suis dit : si je ne suis que ça, une petite souris dans une cage, alors je serai une petite souris qui dévisse, qui fait n’importe quoi. Cette manif du 22 février, je savais très bien qu’elle ne changerait pas le monde (sic), et qu’elle s’inscrivait dans un jeu de pouvoir, de territoires et de symboles qui me dépassent. Mais j’étais excité comme une souris qui a pété un plomb dans sa cage. Et qui tente d’invalider l’expérience qu’on mène sur elle.

Auscultons la manipulation vendue ici et là : « Les flics nous ont laissé la ville » ; « Il y avait des flics/provocateurs dans le cortège » ; « Les flics ont laissé faire ». Ou bien : « En bloquant l’accès à une partie de la ville, les flics ont crée la tension de toute pièce pour discréditer le mouvement ». Cette idée que les flics sont acteurs de la journée est à la fois assez vraie et très mensongère. Je ne rentrerai pas ici dans l’analyse de la répression ce jour-là ; je ne suis nullement un « spécialiste » de la question. Mais je me suis par contre rendu compte que le point commun de ces évocations de « l’émeute » comme favorisées par police tient à l’impossibilité pour les gens qui les évoquent de concevoir qu’on puisse être assez nombreux-ses à être en colère, suffisamment déterminé(e)s et organisé(e)s pour débarquer dans une ville afin de la retourner. Ça leur semble tellement fou et irrationnel que ça doit forcément être un complot. Ben non.

La réalité est beaucoup plus simple : ce jour-là, les flics n’ont pas créé la violence, ils l’ont gérée. Violemment, patiemment et méthodiquement. Et ils avaient certainement conduit un efficace travail de renseignement en amont puisqu’ils avaient compris combien on était motivé(e)s. Ils avaient saisi que s’ils nous laissaient accès à toute la ville, on risquait d’avoir méchamment envie de faire du lèche-vitrine sans pour autant passer par les portes automatiques. J’imagine que de longues réunions se sont alors tenues dans de beaux bureaux soyeux pour décider comment administrer cette colère qui allait parcourir le cortège. Qu’en faire ? Comment la récupérer ?

Loin d’une quelconque théorie du complot, il y a tout de même une réalité qui semble dépasser quelques commentateurs en mal de bons et de méchants. Celle-ci : alors que les festivités allaient bon train et que l’air devenait difficilement respirable, la foule est restée en grande partie présente, à quelques mètres. À nous observer caillasser les flics, tenter de les faire reculer. À nous regarder agir avec sympathie. Et j’avais l’impression que cette foule disait : « Je le sens moyen, ton plan… ça a l’air foireux… Mais vas-y, ne t’inquiète pas : je reste là, je te couvre. » C’était fou, vachement beau à voir. Et encore plus à vivre. C’est aussi ce qui rendait l’intervention des flics si difficile, tant ils risquaient de commettre plus de « bavures » que de nécessaires, de possibles ou d’autorisées. Comme un aval tacite d’une partie de la foule. Lequel a sans doute permis à toutes ces personnes qui n’étaient pas équipées pour la castagne (pas de masque, des vêtements clairement identifiables, etc.) de ne pas finir dans le camion à salade ou en disque de ball-trap pour baqueux en mal de cible.

J’ai aussi lu, ça et là, que les flics auraient fait usage d’une force démesurée et qu’ils se seraient trompés de cible, en « frappant » les gentils manifestants plutôt que les vilains « casseurs ». C’est quoi, un usage de la force mesuré ? Quand les flics font comme à la pétanque, c’est-à-dire tracer un rond au sol à bonne distance, prendre le temps de viser, et commenter gentiment le tir en y allant d’une petite blague impromptue ? Et c’est quoi, trompé de cible ? Ça signifie qu’un tir tendu sur un manifestant pas du tout gentil, qui ne vote pas, qui a pillé le rayon vêtements noirs du Décathlon, et qui a lancé un caillou, ce n’est plus vraiment un tir tendu ? Mon cul ! Moi, je ne vois là que la violence d’État, dans son hideuse banalité, dans sa toute-puissance, peu importe qui s’en retrouve victime. Quant aux quelques pavés qui ont atteint leur cible, reconnaissez que c’est bien la moindre des choses. Il faudrait quand même voir à ne pas oublier, dans un retournement symbolique quasi cocasse, d’où émane la plus grande des violences, la légitime, la rémunérée.

Le côté « sportif » de cette manif n’a pas débordé le cortège. Et il n’a pas décrédibilisé la journée. Au contraire, il l’a transcendée en un joyeux bordel informe et foutraque où l’on ne savait plus trop bien qui est qui. Davantage que la minorité qui déborde, cette journée a été placée sous le signe de la majorité qui bout – et c’est pour cette raison que c’est essentiellement cette dernière qui a été marquée dans son corps par les hommes en arme. Inutile de chercher à tout prix une ligne de démarcation entre pacifiste et « casseurs » : cela relève du rite de conjuration. Ou de la prière, ressassée par celles et ceux qui abhorrent l’idée que la violence que j’exerce – quand je suis en forme – avec d’autres, contre tout symbole du pouvoir, puisse potentiellement être avalisée avec le sourire par monsieur ou madame tout le monde. Le cauchemar du pouvoir, à en réveiller le préfet la nuit.

Définitivement, cette journée du 22 fut sacrément animée. Une sorte de rencontre inter-régionale autour des loisirs créatifs. Un salon international du bien-être. Très sympa. Comme moi, je vous rappelle. Et ce, malgré l’austérité de ma tenue. Oui, j’étais tout en noir. Oui, je portais un masque. Figurez-vous que j’avais bien pensé venir en short et en tee-shirt. Mais ça n’aurait pas été raisonnable : il fallait se protéger de la bande armée qui nous attendait de pied ferme. Croyez bien que je la regrette, cette tenue noire si peu rigolote et fort menaçante. Et que je n’aime pas porter ces masques anonymes. Ils cachent les sourires, nos sourires. Et ils facilitent la construction médiatique et policière de ce personnage du « casseur », cette ombre haineuse et abrutie. C’est pratique, l’ombre : elle ne parle pas, ne pense pas, et permet même de dissimuler.

Sous ce masque, cagoule ou capuche, j’ai un cerveau. Et il turbine. Sec. Trop vite, souvent. Mon cerveau, « l’aéroport et son monde », il y a beaucoup réfléchi. Depuis longtemps, presque depuis toujours. Parce que « son monde », je m’y suis bien cogné le front. Assez pour me sentir résolument déterminé à agir sur ce qui se passe autour de moi. À ne pas accepter, à ne plus accepter. Alors, c’est vrai, cette journée du 22, c’était un peu la fête, le grand rendez-vous. Mais son assise à la fête, c’était ma colère. Précise. Dense. Quotidienne. Physique. Lucide. Rien à voir avec cette idée colportée par les médias et les politiciens d’une masse abrutie de combattants tout de noir vêtus qui se déplacerait au gré des affrontements en France et en Europe sans comprendre où elle est ni pourquoi elle y est. Oui, les fantasmatiques et imaginaires black-blocs. Sauf que moi, je sais très bien sur quel front je me situe, et pourquoi. Je sais très bien que je ne revendique rien, je veux tout. En clair, le 22, je faisais de la politique. A voté. Point.

Et je ne pète pas plus haut que mon cul. J’ai bien compris que l’intensité de cette « guerre » est basse. Je sais qu’il y a d’autres fronts, ailleurs, pas loin, autrement plus violents. J’ai bien conscience que le capitalisme souvent tue ou anéantit, alors que le 22 il se « contente » de blesser. Je ne m’enracine pas dans un imaginaire viril ou guerrier – le moins possible, en tout cas. Et je fais attention à ce que moi et mes copains et copines, on ne finisse pas par ériger un quelconque folklore de la petite guérilla urbaine, même si partager un imaginaire est inévitable. Je sais tout ça. Il n’empêche : cette violence, je la ressens au quotidien. Je la vois, je l’entends, partout, tout le temps. Dans l’histoire, dans l’économie, dans les rapports de genre, de classe, dans le racisme, la répression de toute forme de contestation hors cadre… Cette conflictualité, elle m’habite, elle m’obsède, elle m’a rendu fou parfois. Elle me bouffe tout autant qu’elle m’a fait. Et quand on bouge le 22, je pense à cette violence, aux dernières fois où elle s’est manifestée à moi. Et je me rêve mèche.

Du coup, c’est vrai : on laisse un peu de bordel en repartant. Si peu. Maire et préfet chialent parce qu’on a fait caca dans leurs boîtes aux lettres, comme s’ils oubliaient que ranger le bazar génère aussi de la croissance. Les dégâts causés par « l’émeute » sont bons pour l’économie, non ? Le déploiement du maintien de l’ordre l’est pour nos exportations de matériel policier, n’est-ce pas ? Alors, basta avec cette fable du contribuable qui raque en bout de chaîne. Leurs mots, leur histoire. De toute façon, il ne s’agit pas de mettre à mal le capitalisme en brûlant trois arrêts de bus. Non, l’enjeu réside dans la manière dont ce genre de journée irrigue le quotidien de celles et ceux qui les vivent, quelle que soit leur place dans les festivités. Comme le retour du corps, du corps comme interface avec le conflit. C’est le corps qui est en jeu – réalité précieuse à l’heure où l’exercice de la citoyenneté et du conflit, et donc de la politique, repose sur la confiscation de la parole, sur la délégation du pouvoir et sur une dilution permanente de la responsabilité. C’est le corps qui est en danger, aussi. Tripes, jambes, cerveau. Nos corps sont nus, ceux d’en face sont protégés par une véritable carapace. C’est frappant. Et toutes celles, tous ceux qui étaient là n’auront pas manqué de noter cette distorsion de moyens, l’État apparaissant pour ce qu’il est : une arme à la ceinture d’un homme. Un vrai dévoilement, qui affecte des vies et des quotidiens.

Ce versant physique de l’exercice d’une force collective met en jeu la puissance et la peur. La puissance d’agir, d’être. Un sentiment de présence au monde rare. Une danse sur la plus étrange des musiques, celle de la révolte. Avec des gens sur le côté de la salle des fêtes, semblant attendre qu’on les invite. Manquent uniquement les nappes en crépon… Et la peur ? C’est celle de ce qu’il y a en face, de la blessure, de la répression. Celle de là où nous mène la colère, aussi, de ces points de non-retours franchis. Celle de constater qu’on vit déjà au-delà de soi-même, qu’on ne se reconnaît plus très bien parfois. Comme une espèce de tempête en interne, vécue par toutes celles et tous ceux qui mettent pareillement la main à la pâte. Il ne te reste alors qu’à écouter, qu’à sentir et ressentir.
Et ce jour-là, justement, j’ai entendu des gens vociférer, et les altercations ont été aussi nombreuses que les rires. Fallait-il brûler cette voiture ? Faire fuir de façon vigoureuse cette camionnette de BFM-TV ? Défoncer cette vitrine ? Ce sont de bonnes questions, que tout le monde devrait se poser. Et justement : quand ça brûle, ça casse, ça pète, tout le monde se les pose. Parce que ce jour-là, ces questions sont ressenties, vécues – elles ne sont plus simplement théoriques. Rien que pour ça, ça vaut le coup. Impression que je participe à ouvrir alors la plus belle agora du monde. Ensuite, à chacun de fixer son curseur.

En ce qui me concerne, j’ai choisi. Et quand tout le monde se défoule gentiment sur le camion égaré d’une grosse chaîne de télé, au grand dam des journalistes qui sont au volant, j’y vois la preuve que personne n’a envie de se faire voler le compte-rendu des débats. Surtout pas moi. C’est d’ailleurs pour ça, je crois, que cette journée du 22 m’a tant trotté dans la tête quand d’autres manifestations similaires ne m’avaient pas tant marqué. C’était le désir de raconter mon histoire tandis qu’on me la volait qui tapait au portillon. L’envie de rappeler que je ne dors pas entre deux « émeutes ». Que j’ai une vie bien remplie. Que si « émeute » il y a, elle n’est qu’un temps politique parmi d’autres dans ma vie – pas forcément le plus important, d’ailleurs. Que j’ai méchamment envie de tout péter, car j’ai furieusement envie de construire autre chose qu’un monde mort. Que je suis – je crois – assez lucide sur la pertinence et la limite de nos gestes, et qu’il s’agit aussi d’un besoin, d’une pulsion. Et que les feux allumés ce jour-là, réchauffent toutes les démarches que je mène une fois retourné à mon quotidien. Le son de « l’émeute », je l’entends tout le temps dans ma tête, obsession qui habille le réel de la plus belle des manières.

Vous n’êtes pas obligés de croire à cet hydre du « casseur » agité par certain(e)s. Vous n’êtes pas obligés de reprendre à votre compte l’histoire que propose le pouvoir. Faîtes plutôt la vôtre. Et la prochaine fois qu’on se croise alors que les animations battent leur plein, n’hésitez pas à vous rapprocher et à venir me parler. Rappelez-vous : avant d’être un « casseur », je suis hyper-sympa.

PS.: est-ce utile de nommer la source pour un pamphlet anonyme…? 😉

Flash-ball et grenade de désencerclement

– Premier cas: 22 février, manif contre l’aéroport de Notre Dame des Landes, Yves Monteil, photographe, fondateur de Citizen Nantes :

« Toute la finesse policière. Alors que je filmais et ne représentais aucun danger j’ai senti un choc au niveau de la poitrine. Suis tombé net et ai tout de suite compris qu’un tir de flash-ball a courte distance m’avait touché. Et c’est rien comparé aux blessés en pleine face….

Ce samedi 22 février 2014, je couvre, comme photographe indépendant, le rassemblement d’opposition à l’aéroport de Notre Dame des Landes. Mouvement que je suis – en photographie – depuis 2009… Je suis équipé d’un appareil photo avec une longue optique (300mm) et d’une mini caméra.

Après plusieurs minutes de capture vidéo et de photos à l’angle du quai Turenne et du Cours Olivier de Clisson, je suis témoin d’un gazage à la lacrymogène d’un groupe de journalistes. Tout en filmant je m’oppose verbalement  – « Héé, c’est des journalistes!«  – avant de recevoir un tir de flash ball dans la poitrine.

Ce récit en 17 images est réalisé avec les captures d’images fixes de ma caméra (In) et d’une caméra (Off) qui se trouvait derrière moi. Leurs auteurs ont bien voulu me les fournir. Il est important de bien voir ces photos avant de regarder la vidéo tout en bas…

Ce mec est de toutes les manifs du coin, c’est un peu notre « mediActivista », il se trouve avec un groupe de journalistes de la presse locale et nationale, il a au cou un appareil doté d’un objectif 300mm blanc des moins discret, il est dans une portion des plus calme, ne représente aucun danger… sauf pour deux petits branleurs de flics: un crétin de CRS à la gazeuse fébrile et une petite frappe de la BAC qui prend son flash-ball pour une extension de son pénis..! (quoique si on se réfère à Brassens… il semblerait que: « par bonheur, ils n’en avait pas..! 🙂 ) La blessure, un gros hématome, n’a rien à voir avec la gravité de celle d’un jeune manifestant qui lui, a perdu un œil – un de plus! – le même jour, il s’est pris la grenade assourdissante d’une racaille étatique en plein visage!

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Celui qui a pris cette photo est visé par rien moins que deux débiles, en-deçà de la distance réglementaire! BAC Bloc?

– Reportage, photos et vidéo sur Citizen Nantes
– Pour un article détaillé sur les divers Flash-ball voir ICI

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– Second cas: 22 février, manif contre l’aéroport de Notre Dame des Landes, Gaspard Glanz, journaliste de RennesTV :

En analysant image par image la séquence de l’explosion, on se rend compte que l’engin qui explose au pied du journaliste n’est pas une grenade assourdissante, mais une grenade de « désencerclement » – « Dispositif Balistique de Dispersion », (DBD) ou « Dispositif manuel de protection » (DMP). C’est une grenade explosive qui contient 18 fragments de plastique dur, en plus de sa douille en métal, projetés dans un rayon de 15m autour de l’explosion et qui atteint une intensité sonore de 165 dB à 5-15m selon le fabricant, la Société d’application des procédés Lefebvre (SAPL). Le problème c’est que cette « arme de guerre » n’est pas censée être utilisée « offensivement », mais uniquement dans des situations réelles « d’encerclement » qui nécessitent un acte « défensif » de la part de la police. En l’occurrence, les CRS étaient ici en ligne à plus de 20m, protégés par un canon à eau : il n’étaient donc absolument pas encerclés, et encore moins au contact des manifestants. Normalement, si la police avait respecté la procédure légale : de telles grenades n’auraient jamais dû être employées pendant toute la durée de la manifestation.

Encore une fois, ce journaliste se trouve loin des heurts avec les CRS, dans un groupe clairement identifié comme « presse »… Ce qui n’empêche nullement ces porcs de CRS de lancer, non pas une , mais bien une flopée de grenades diverses sur le groupe de journalistes en position stationnaire depuis dix minutes..! Une première grenade assourdissante est envoyée, suivie une seconde plus tard de deux DBD ainsi que d’une CM6 (la cartouche qui libère 6 pastille de gaz lacrymogène CS), pourquoi faire, on se le demande… Des CRS qui trouvent le temps long? Tu t’imagines, dix minutes sans pouvoir faire l’homme avec mes grenades? « Putain, on se fait chier chef, allez, on se défoule en attendant sur ces connards de journalistes..?!? »

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Et il avait pourtant enfilé deux pantalons par prudence…

L’onde de choc m’a arraché la peau au niveau des deux chevilles sur une surface de plusieurs cm2, presque symétriquement, tout en causant des brûlures au 2e et 3e degrés. Plus de 72h après l’explosion, ces plaies ne sont toujours pas cicatrisées, la chair y est encore à vif quand elle n’est pas carbonisée. L’explosion a par ailleurs projeté 3 fragments sur mes deux jambes : celui qui a atteint ma cuisse est clairement identité comme une balle de plastique rond (on dirait l’impact d’une bille). La blessure sur ma jambe droite, par sa forme beaucoup plus grande et son hématome plus large (ainsi que la douleur plus forte), fait plutôt penser qu’il s’agit de l’impact de la douille en métal. Un dernier fragment a ricoché contre l’articulation de mon genoux droit, provoquant un hématome de plusieurs dizaines de centimètres carrés sans perforation. Et il faut savoir que j’ai eu de la chance : les fragments n’ont pas pénétré sous la peau comme cela se voit souvent (ZAD…) lors de l’explosion de ces grenades, et ce pour un bonne raison : je portais deux pantalons pour m’en protéger. Les fragments ont percés le premier, mais pas le deuxième. Sinon, il aurait probablement fallu m’opérer pour retirer des éclats sous-cutanés.

– Reportage, photos et vidéos sur RennesTV

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Grenade de désencerclement, vous avez dit… inoffensive..?!?

grenade de désencerclement DMPVoici le type de saloperies utilisées à Nantes. Vous avez bien lu..! 160 Db de niveau sonore (annoncés à… 5-15m) et 80 joules d’énergie cinétique pour les billes! Pour comparer, voir le tableau ci-dessous pour le son, et pour se faire une idée de la force des billes… un pistolet de Paint ball ne peut dépasser les… 7,5 – 10 joules et ne peut être utiliser qu’avec protections individuelles sérieuses! Il est réglementairement prévu de les faire rouler vers les manifestants et uniquement pour se dépêtrer d’une situation à risque pour les poulets, d’où l’appellation « de désencerclement »! Quand on se souvient des quantités astronomiques de grenades ramassées après les offensives des CRS et Gardes mobiles sur la ZAD en novembre 2012… combien de grands sacs poubelles furent remplis! Sans compter les multiples blessés par ces saloperies, à qui on a du extraire des éclats de grenades des visages, des jambes, etc..!

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A partir de 130 Db la loi impose des mesures de protection, à 120 Db on atteint le seuil de la douleur et aux alentours de 160 Db les tympans éclatent..!

Parmi les blessures dues aux DMP, on compte entre autres : une joue ouverte pour une manifestante contre les nanotechnologies à Grenoble en 2006, la perte d’un œil, du goût et de l’odorat pour une jeune femme observant une manifestation dans cette même ville en 2007, l’amputation de deux orteils d’un manifestant à Saint-Nazaire en 2009 (« en cas de guerre civile, il faut du répondant », lui explique la police des polices), et la même année des brûlures et des plaies au contre-sommet de l’OTAN (Organisation du traité de l’Atlantique nord) à Strasbourg, sans omettre les nombreux blessés de la ZAD.

Bref, ce genre d’engin utilisé abondamment par les forces du désordre comme s’il s’agissait d’un jouet, n’est en fait qu’une grenade offensive camouflée, comprenant des pièces métalliques éjectées en tant que fragments lors de la déflagration, et ses billes en plastique dur font de graves dégâts, sans parler des dommages auditifs permanents engendrés. Les flics, comme pour le flash-ball ne respectent aucunes des directives et mesures de sécurités requises pour son usage, usage clairement incompatible avec le faible niveau d’instruction et moral du pandore de base… qui plus est avec celui d’un CRS aux quatre neurones continuellement en conflit sur le choix du remontant… Kronenbourg ou Ricard???

Sur le même sujet:

« Armement : police et armée aiment le son qui fait mal »

« Armes non létales ..? »

« L’usage dangereux des grenades assourdissantes »

« Grenades assourdissantes: une vidéo soulève des questions »

« Étudiant blessé à l’œil: son père en colère »

« Conseils d’urgence à l’intention des personnes gravement blessées par la police« 

« Avec ‘SÈME TA ZAD!’ nous voulons mettre en place, dès maintenant une communisation des terres et des pratiques. Nous prenons la terre et nous la garderons! »

Pas question de laisser le champ libre à Vinci. Plus d’un millier d’opposants – armé de bêches, de fourches, de pioches et autres outils, venant de tous horizons – au très hypothétique futur aéroport de Notre-Dame-des-Landes ont organisé une manifestation, samedi 13 avril, sur la Zone à défendre. Au programme de la journée, nommée « SÈME TA ZAD! », plantations de pommes de terre, semis, montage de serre, poulailler, petits fruitiés, réfection de clôture, création de chemins pour ne pas abîmer les champs (éviter la police aussi…) et curage de fossés.

Bizarrement, aucune trace des barrages de flics!!! Ils ont dû choisir de faire profil bas, ou de faire comme si il n’y avait pas d’occupation militaire quand les médias débarquent… Dans le cortège au sud de la Zad, une « samba » suivait une banderole proclamant « Sème ta Zad, occuper, cultiver, résister ».

Malgré l’arrivée du printemps, c’est sous la pluie qu’un des groupes a emprunté la « RD281 », cette route barrée de chicanes depuis le début des tentatives d’expulsion en octobre 2012, où de multiples affrontements avec ces chiens de CRS ont eu lieu. « Avec les différents chantiers agricoles, nous renforcerons l’implantation dans la durée des occupations sur la Zad », a expliqué un porte-parole des camarades zadistes, monté sur une remorque, « Construire là où il veulent détruire, cultiver là où ils veulent bétonner », a-t-il proclamé..!

Dans le Sabot, une vingtaine de zadistes ont enrichi à l’aide de fumier un grand jardin maraîcher collectif. Dans un autre, à côté de nouvelles cabanes baptisées les 100 Noms, des rangs de pommes de terre et de fraisiers étaient plantés. Après avoir déjeuné autour de tentes de restauration collective, les zadistes se sont dispersés vers les différents ateliers de curage de fossés ou de réfection de clôture, certains chantiers prévus ayant dû être repoussés à cause de la pluie et de la terre détrempée. Au nord, où la ferme de Bellevue est occupée depuis janvier – par le collectif « Copain », regroupement d’organisations agricoles en lutte contre l’aéroport – pour éviter sa destruction, plusieurs centaines de zadistes se sont également rassemblés. Ils y ont fait la première fournée de pain sortie du vieux four en pierre qu’ils avaient remis en état il y a peu.

« L’hiver n’a pas été évident, les conditions climatiques, la fatigue, le stress… » […] « Là, on est au début du printemps, c’est plein de nouvelles énergies » [...] « peut-être qu’on va pas faire germer des graines mais on va faire germer plein d’idées qui vont durer des semaines ».

Une certaine « animosité » fut ressentie envers les collabos journalistes des merdias mainstream… Il parait que deux véhicules siglés des logos de la presse, ont eu leurs pneus dégonflés, la boue a fusée à plusieurs reprises sur une équipe télé, et au micro, il a été évidemment demandé aux « journalistes journaleux des médias bourgeois » de ne pas filmer les personnes présentes sans leur permission. On se demande pourquoi… 😉

Les photos de la journée « Sème ta ZAD! »  Purée, qu’est-ce que j’ai hâte d’y aller cet été..!!!

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En bonus – pour ceux qui s’y rende bientôt… Le lien de la carte détaillée de la ZAD.

La Cour de cassation vient d’accorder un délai d’au moins 18 mois aux opposants au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes.

Une heureuse surprise pour les défenseurs du bocage.

L’embourbement du gouvernement Ayrault dans la zone humide de Notre-Dame-des-Landes n’est pas près de se dénouer. Nouveau fait majeur dans la bagarre qui oppose Vinci aux paysans menacés d’expulsion, mardi 29 janvier, la Cour de cassation a décidé… de ne rien décider..! Elle attendra que tous les recours administratifs soient jugés pour examiner un pourvoi formé par les occupants de la zone d’aménagement différé contre leur expropriation (voir les arrêts de la Cour de cassation).

Ces derniers ont saisi le juge administratif en octobre 2011 pour faire annuler l’arrêt de cessibilité (liste préfectorale des parcelles qui doivent être expropriées) qui les concerne. Ce recours a été débouté en décembre 2012 par le tribunal administratif de Nantes, mais il fera l’objet d’un appel, voire ultérieurement si besoin d’un recours devant le Conseil d’État.

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Une quinzaine de fermes doivent encore être détruites

En attendant, le concessionnaire Aéroport du Grand-Ouest (Vinci), qui doit acquérir les terrains convoités, devra patienter! Les expulsions sont donc retardées pour la quinzaine de fermes qui doivent encore être détruites. Et ce, pour une période de 18 mois à deux ans, selon les estimations des opposants et leurs avocats. « C’est une surprise », explique Dominique Fresneau, coprésident de l’Acipa, une association d’habitants et d’exploitants menacés d’expulsion. « Jusqu’à présent le projet avançait malgré tous nos recours. »

Cet arrêt ne protège pas pour autant les occupations illégales installées dans des cabanes et des fermes expulsées, sur la Zone d’aménagement différé (Zad) visé par le projet d’aéroport. Le face-à-face entre opposants et forces de l’ordre, qui dure depuis le 17 novembre, devrait donc se poursuivre, alors qu’une « trêve » est encore théoriquement à l’œuvre jusqu’au mois de mars dans le cadre des travaux de la « commission de dialogue ».

« Le pouvoir joue l’apaisement, il n’y a pas de pression de la préfecture centrale, raconte Dominique Fresneau. Les contrôles systématiques embêtent surtout les locaux qui doivent circuler pour travailler sur leurs terres. C’est une stratégie qui vise à installer un climat malsain, mais il n’y a pas d’affrontements. »

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Embarras de François Hollande

Sur le plan politique, le dossier reste un véritable bourbier pour la majorité. Interviewé, mercredi 30 janvier par l’Express, Nicolas Hulot, « envoyé spécial de François Hollande pour la préservation de la planète », décrivait un Président « embarrassé » sur la question.

« Concernant la pertinence du projet, je ne suis pas certain que le Président en soit convaincu, mais il ne peut pas désavouer son Premier ministre. Nous avons en France un déficit démocratique ; nous ne savons pas organiser des débats publics dignes de ce nom », jugeait-il.

L’embarrassante épreuve de force devra donc encore durer au moins un an et demi. Un marathon que les opposants comptent mettre à profit pour organiser et densifier une mobilisation « lourde, ardue, mais que nous avons tous ici à cœur », confie Dominique Fresneau.

Source: Politis.fr - 04/02/2013